Camp de Gurs (64-France)

Extrait de "Lettres à mon fils " de Maurice Meier

"Gurs,...
Cher Ernest,

    Oncle Jakob et oncle Heinrich sont morts. [...]
    Le bruit ne cesse de courir, que nos morts sont volés dans le camp. Entre autres, on cite deux coreligionnaires de l'aristocratie du camp, qui, dit-on, sont impliqués là-dedans. Je ne peux pas le croire, que l'un d'eux s'enfonce si loin, jusqu'à se saisir , en tant qu'interné, de ses compagnons de souffrance morts.[...]
    Une nuit, une femme est allée aux toilettes. Elle posa le pied à côté de a passerelle, tomba sur le visage, et n'arriva plus à sortir de la boue. Comme elle tardait à revenir, sa fille, qui dormait à côté d'elle, est allé voir. Elle trouva sa mère morte, reposant sur la face, étouffée. Mais ce n'est qu'un des nombreux épisodes tragiques, qui se passent chaque jour.[...]
Deux jeunes garçons ont été transportés à l'infirmerie, plus morts que vifs. Que s'était-il passé? Les rats s'étaient permis de faire, sous le baraquement du commandant, un bruit aussi fort, que sous les baraquements ordinaires. Cela a perturbé le calme de la nuit du chef de l'îlot, et il a décidé, de faire jeter du pain empoisonné autour de son baraquement. Les deux jeunes gens ont trouvé le pain. Ernest, tu dois savoir, que tout ce qui est mangeable, peu importe, où cela se trouve, est ramassé et avalé avidement. Des boîtes de sardines, qui se trouvent sur un tas de déchets, sont enlevées, dans l'espoir, qu'il y ait encore une goutte d'huile[...]

    Cordiales salutations

    Ton père."